mercredi 27 novembre
LE POLE DE LOUGA EST-IL CONDAMNE A RESTER LETTRE MORTE ?
L’urgence d’une anticipation
La mise en œuvre de l’Acte 3 de la Décentralisation, nous dit-on, est en phase d’activation. Après le pôle de la Casamance qui devait servir de test, celui de Kaolack est en train de polariser, c’est le cas de le dire, l’attention des autorités sans que les leçons, qui devaient être tirées de l’expérience casamançaise, le soient. Il n’est pas nécessaire d’avoir une vue de lynx pour se rendre compte que le gouvernement marche à l’aveugle en matière de décentralisation. L’Acte 3 avait déjà perturbé le fonctionnement de toutes les collectivités locales, désormais affublées de façon cosmétique de l’attribut territorial alors les délimitations entre ces entités ne sont pas clairement imprimées sur le terrain. Les institutions locales, pour la plupart, sont aujourd’hui ankylosées et, pour certaines, se débattent dans des conflits à relents politiques avec l’Etat central comme à Dakar. Si les populations des régions de Dakar, Ziguinchor, un peu moins celles de Kaolack nagent dans ce flou artistique orchestré par l’incompétence de ceux qui ont conçu cette nébuleuse qu’est l’Acte 3 et l’indécision de ceux qui ont la charge de la mise en oeuvre de cette réforme, les populations de Louga et des autres régions du pays sont dans une indescriptible indétermination. Comme pour les saisons de pluie, il leur reste qu’à s’en référer au ciel pour que les choses marchent. Le gouvernement n’est pas encore dans l’optique d’aller vers la concrétisation de cette politique de création de pôles. Tout au moins si l’on s’en remet aux activités éparses d’un ministre en charge du secteur qui fait des tournées de courtoisie dans les différentes capitales régionales du pays. Il est bien facile pour ce ministre de s’adosser au Plan Sénégal Emergent, ce nouveau catéchisme des autorités, pour se donner une perspective de la décentralisation. Si les deux peuvent aller de pair, il faut noter qu’ils ne sont pas de même nature. Les confondre serait encore une hérésie de plus. Et s’il faut attendre ce ministre qui marche au pas de caméléon pour initier le débat sur la décentralisation à Louga, reportons-nous aux calendes grecques.
Ce n’est peut-être pas la faute à Moussa ou à Omar. Mettre en place une politique de décentralisation n’est pas affaire d’aller à la pêche à la truite le dimanche. C’est une activité complexe. Très complexe. Une profonde connaissance des rouages de l’Etat ainsi qu’une très longue pratique de ses mécanismes sont certes nécessaires mais loin d’être suffisantes. On se rappelle que rien que pour le découpage du Sénégal en six régions, mission qui avait été confiée par le président Senghor au Père Lebret, avait nécessité près de deux années de prospection du terrain à pied, en voiture et en avion et des milliers de pages de notes avait été produites. On ne décentralise pas en restant dans les cabinets ministériels. Et on ne s’improvise « décentralisateur » au gré des remaniements ministériels. La situation déplorable de l’Acte 3 aujourd’hui le prouve.
L’acte de décentralisation présuppose une fine connaissance du terrain, de sa configuration, de ses ressources naturelles, géologiques et minières, et du potentiel de richesses susceptible d’en être retiré. Cette cartographie physique n’est non plus pas suffisante. Il est indispensable aussi d’avoir une connaissance des gens, des populations qui vivent dans ces territoires, de leur composition et leurs rapports, de leurs modes de vie, leur histoire, leur patrimoine, leur mode d’organisation, les types d’association qui existent sur ce territoire, etc. Elaborer une politique de décentralisation sur un territoire défini est toujours faire œuvre originale. Enfin, la connaissance des modes d’exploitation anciens et nouveaux des richesses de la zone considérée, faire un benchmarking des pratiques de production, en repérer les meilleures et voir comment introduire l’innovation de système est indispensable. Evidemment, on ne peut demander à un seul homme de cumuler tous ces savoirs, de surcroît à un ministre de simple extraction politique. Le territoire lougatois recèle d’énormes potentialités. Comment internaliser tout ce potentiel ? Comment créer des systèmes alimentaires territoriaux (SAT) dans la zone pour soulager les populations et booster la production ? Quel est le niveau le plus pertinent pour créer des polarités efficaces, les communes, les départements ou l’ancienne entité régionale ? Faut-il créer un ou plusieurs pôles ? Est-il nécessaire de mettre sur pied des intercommunalités et/ou des inter-polarités ?
Ce sont là des questions auxquelles seuls les Lougatois peuvent répondre. Et s’ils n’anticipent pas sur la démarche des autorités, le pôle de Louga restera lettre morte, délaissé comme disait quelqu’un à « la critique rongeuse des souris ».
C’est à ce débat, chers concitoyens, que nous vous invitons
Moustapha Sarr Diagne Louga Infos.
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