mercredi 27 novembre
Prononcer le nom de Khatary Fall et dire qu’il est une mémoire vivante de l’histoire de Louga, c’est faire une tautologie. Natif de la ville, il comptait ses cinq hivernages quand la seconde guerre éclata, cette guerre qui a laissé des traces indélébiles dans sa mémoire. Ses études primaires, il les a faites à l’Ecole régionale 1 de Louga avant de rejoindre Saint-Louis pour poursuivre son cursus scolaire au Lycée Faidherbe. Comme cela était d’usage en ces temps-là. Parcours donc très classique au commencement pour un homme qui ne se prédestinait pas à une carrière aussi sinueuse que celle de Khatary Fall. Enseignant de profession, il exerça ce métier de 1961 à 1968. On sait que ce corps, qui fut d’élite, a fourni ses éléments à l’ensemble de toutes les catégories professionnelles de l’administration et même du secteur privé aux premières années des indépendances. L’enseignement peut mener à tout. Ainsi Khatary Fall devint journaliste. Correspondant de presse, un des premiers à exercer cette fonction dans le pays, il le fut de 1972 à 1980. Est-ce que Khatary a été piqué par le virus de l’écriture ? L’hypothèse est fort raisonnable. Entre 1982 et 1992, il fut rédacteur en chef du journal « La République » et de surcroît employé d’imprimerie. Khatary était en plus un excellent joueur de dames, l’un des meilleurs à Louga. « Le journalisme mène à tout à condition d’en sortir » comme le dit l’adage, le lecteur serait bien de le retrouver entrepreneur en BTP. A condition d’en sortir, disions-nous. Khatary Fall n’était pas sorti de cette auberge. Il a juste changé de place, quelque peu dérivé. Le journaliste est devenu écrivain. Poète, historien et essayiste. Depuis près d’une quinzaine d’années, il se consacre essentiellement à l’écriture. Très attaché à ses origines, son œuvre se compose de poèmes essentiellement consacrés à sa ville natale de Louga. Khatary Fall dit lui-même dans une sorte d’autoportrait : « je me réclame de trois cultures : l’arabo-berbère de mes origines, la française de ma formation, la négro-africaine de mon adoption, de mon intégration et de mon ancrage. Oui, je dis bien de mon ancrage. En effet, les valeurs d’honneur, et de « téranga » que cette population véhicule et qu’elle incarne sont les plus adaptées et les plus conformes à la vision que j’ai de l’homme et des relations humaines ». La langue est savoureuse, reconnaissons-le. Il est une mémoire vivante de cette province du Njambur. Il l’est encore plus du football lougatois. Khatary Fall en est l’auteur d’une imposante monographie. Nul ne peut évoquer l’épopée du football lougatois sans faire référence à la production de KhataryFall dans ce domaine avec des textes, desrécits précis et des anecdotes succulentes. Cet homme qui aime le « voyage à travers le temps », selon ses propres mots, dans son recueil de poèmes et d’essais intitulé « Nostalgiques » où il retrace la saga de la famille Lô qu’il considère comme la crème de l’intelligentsia à Louga, évoque la gloire des anciens combattants du pays qui ont fait le coup de feu lors la première guerre mondiale, rappelle les douloureuses années de privations de la seconde guerre et a dessiné le portrait de quelques grandes figures politiques et administratives de la ville. Au-delà du football lougatois dont il a vécu toutes les péripéties, Il est multidimensionnel. Parcourir son œuvre est un plaisir. Que le lecteur ne s’en prive point.
Quant à nous, à Louga Infos et LG8TV, nous regretterons longtemps sa belle plume. A l‘occasion de son décès survenu ce jeudi 2 janvier 2020, nous adressons nos sincères condoléances à sa famille éplorée, à toute la ville de Louga. Nous avions, avec sa collaboration, entamé un livre qui retrace les 50 ans du Ndiambour. Il n’aura pas, malheureusement, assisté à sa publication à cause du décret divin. Que la terre de Louga lui, cette ville qu’il a tant aimé lui soit légère.
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