mercredi 27 novembre
Ce n’est qu’un épisode de plus dans une opération de grande envergure de bradage du patrimoine national. La gare de Louga a été mise aux enchères. La cession à des privés de ce patrimoine par le liquidateur des chemins de fer la gare est un véritable scandale. Ainsi dit, on est encore dans l’euphémisme parce que l’esclandre outrepasse le raisonnable et suscite une grande indignation.
La Situation est iconoclaste. Comment peut-on procéder ainsi au moment où L’État est en train de mener une politique de redynamisation du transport ferroviaire. Un Conseil des ministres s’est tenu le mercredi 11 mars 2020 qui a examiné et adopté le projet de loi autorisant la création de la société nationale dénommée « Les Chemins de Fer du Sénégal (CFS) ». Une loi a été votée le 22 mars par l’Assemblée Nationale qui dissout l’Agence nationale des Chemins de Fer (ANCF) et le personnel et l’actif de Dakar Bamako ferroviaire (DBF) seront versés dans les CFS. Cette nouvelle entité a hérité des immeubles et du matériel fixe d’exploitation relevant de l’activité ferroviaire appartenant à l’État.
Le bâtiment abritant l’ancienne gare avait, pour les Lougatois, une grande valeur symbolique inestimable. La ville vibrait au son du sifflement du train. Dans tous les quartiers, l’arrivée du train était synonyme d’un foisonnement d’atictivités. C’etait le systole et le diastole de la ville. Lui enlever sa gare, c’est enlever à Louga son coeur. Mais un liquidateur n’a foin de telles considérations. Ces gens, en général, n’ont qu’un coeur de pierre et n’ont foi que dans les avantages que leur procure la comptabilité de leur opérations.
Seulement, dans le cas d’espèce, il y a maldonne. Puisque dans l’espace de la gare de Louga existait un très grand hangar qui servait de dépôt pour la révision et la réparation des locomotives. C’est ce hangar qui fait l’objet d’un bradage incroyable. Ce grand dépôt a été attribué à un homme d’affaire agissant au nom du GIE dénommé Touba Matériel Pétrolium«TMP » qui disposerait d’un contrat en bonne et due forme signé par ce liquidateur selon le chargé de collecte des contrats de location de l’espace ferroviaire Elhadj Amadou Ndiéguène Diagne. Alors que ce hangar qui se trouve effectivement dans le domaine ferroviaire mais se situe au plan juridique dans l’espace domanial de la commune de louga. Ce GIE a entrepris de brader toute la structure et la charpente de ce bâtiment composé de fer de haute qualité. Avant le bradage du local, toutes les tuiles avaient été vendues. Selon Diagne le client en personne avait signifié au liquidateur qu’il avait besoin du fer. C’est ainsi la vente a été concrétisée et toute l’armature du hangar fut vendue au GIE TMP. Une fois la cession signée le liquidateur lui a donné un bon d’enlèvement en lui disant d’en donner une copie au préfet, une copie au commissaire de police non seulement pour leur signifier que c’est le liquidateur qui lui a donné toute cette liasse mais également en cas de contestation qu’il puissent saisir le procureur pour exécution. Ce qui a expliqué la présence de la police le jour du démantèlement du hangar.
La ville de Louga qui fait l’objet d’un déficit patent d’infrastructures. le transformer en école, en salle de spectacle, en centre commercial ou même en centre social en tout cas quelque chose d’utile aux lougatois. Ainsi, depuis quelques temps, on observe dans cette ville de Louga que les symboles qui ont marqué plusieurs générations disparaissent à un rythme TGV sans que personne ne lève le petit doigt. Sous Le régime socialiste les rails Louga Linguère avaient été vendus. Sous le régime Benno Bokk Yakkar, ce sont les locaux de la gare qui sont mises en vente et même le foncier du domaine ferroviaire n’échappe pas aux spéculateurs. Cette gare dont la première partie où il y avait la buvette tenue à l’époque par Victor Carréra et qui abrité également un poste de santé et un logement fut inaugurée le 20 juin 1884. Le grand bâtiment qui lui est accolé a été construit en 1894 et servait de bureaux et de logement du chef de gare. Ce bâtiment vieux de 126 ans risque de tomber en ruine. D’ailleurs ayant senti le danger la protection civile de Louga a mis un périmètre de sécurité tout autour.
Sous le régime socialiste, les rails de la voie de chemin de fer qui allaient de Louga jusqu’au cœur du Djoloff avaient été vendus. Un véritable pactole pour l’acquéreur un grand marabout qui était très connu des Sénégalais. Les lougatois ont assisté sans lever le petit doigt à ce scandaleux marchandage du patrimoine . Cet acte avait été étouffé en haut lieu de sorte qu’aucune information n’était disponible pour le public. L’on s’était alors contenté de faire quelques commentaires dans les chaumières et l’affaire s’en était arrêtée aux rumeurs. Rappelons que la ligne Dakar-Saint Louis avait un trafic intense. Le projet avait été initié par Pinet Laprade qui s’était investi totalement pour sa réalisatition. La construction de ce chemin de fer fait partie de l’un des episodes les plus tumulteux de l’histoire sénégalaise. On se souvient de Malaw, le cheval de Lat-Dior qui ne voulait pas traverser le rail. Simple anecdote qui atteste de la résistance à la pénétration coloniale au Sénégal.
L’embranchement Louga Linguère a été réalisé en 1927-1928. Ne disait-on pas que le rail est indissociable à l’histoire de Louga dont le développement s’est fait le long de la voie ferrée dans l’axe nord sud. C’est en 1885, que le chemin de fer Dakar-St Louis fut inauguré. Le passage à Louga ayant fait l’objet d’un traité avec le Djaraf Ndiambour. Et également grace à l’Administrateur Abel Jeandet qui, le 18 janvier 1887 obtient du Gouverneur du Sénégal l’érection de Louga en Cercle.
Tout ce patrimoine est non pas seulement matériel aussi culturel et historique. Qu’un petit liquidateur efface tant de pages d’histoire, c’est la rançon de la République des nains politiques.
Moustapha Sarr Diagne
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